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 -7-       Le recueil et le mouvement vers Pleiku.

Lorsque le GM 100 subit l’assaut adverse, le groupement de recueil, aux ordres du lt/col Sockeel, est encore, du fait de l’avancement de l’opération, à plusieurs heures du col du Mang-Yang où, selon les ordres,  il ne devait arriver que le 25 matin. En principe il devait marquer un arrêt sur la coupure de Dak Ryunh pour rétablir le passage et y laisser le GAP pour assurer la sécurité du retour vers Pleiku.

Cette étape dut être brûlée et le GAP fut poussé au plus vite vers PK 22 avec un appui d’artillerie ; le GM 42 suivit sous la protection mobile des chars. Il s’agissait à la fois de recueillir les éléments du GM 100 arrivant à travers la brousse et de tenir le col où des parachutages allaient apporter de quoi ravitailler les unités de recueil et donner aux unités exfiltrées les moyens de poursuivre le combat.

                                                Schéma de l’embuscade.

Dans la soirée du 24 le col Sockeel reçut l’ordre, signé Salan, de se porter à l’Est pour récupérer ce qui pouvait l’être du convoi Un contact direct avec le cdt du BM 43 l’avait convaincu de la quasi impossibilité d’une telle action, ,  le général SOP venu sur place approuvait ce point de vue. Sur un message comminatoire signé Salan confirmant l’ordre initial il répondit « formellement non ».Finalement le Col cdt l’opération venu sur place approuva cette position et Saïgon n’insista pas ; il faut dire que les renseignements indiquaient qu’un troisième régiment Viet était susceptible d’intervenir ; il le fera d’ailleurs comme nous le verrons plus loin.

Depuis le 24 au soir les éléments à pied du GM 100 qui avaient échappé à l’embuscade se frayaient un chemin à travers la brousse. Ce sont les bataillons du rgt de Corée, les artilleurs du RAC, les restes du TDKQ. Vu le terrain il a fallu les fractionner par petits paquets aux ordres d’un officier ou d’un sous-officier. L’ennemi tenta une poursuite mais aucune ligne d’interception ne s’offrait et la plupart parviennent à passer au prix de quelques accrochages. La résolution des hommes à échapper aux viets les soutenait mais cette équipée comportait bien des points noirs : certains s’égarèrent et seront capturés ; les blessés graves ne peuvent être brancardés par des hommes épuisés ; au mieux ils seront récupérés par l’ennemi, au pire ils mourront seuls dans la brousse. A partir du 25 matin le contact est pris avec les parachutistes à PK 22 et une noria de camions transporte les rescapés épuisés au col.

La pression ennemie se fait de plus en plus sentir et le soir, les rescapés se faisant de plus en plus rares PK22 est abandonné et détruit

La journée du 26 fut consacrée au recomplètement et à la réorganisation des unités grâce aux parachutages. Les hommes du GM 100 avaient gardé leur armement , mais outre les munitions et la nourriture il fallait souvent les rhabiller ; l’herbe à éléphant et les épineux sont mortels  pour les treillis. Saluons au passage le capitaine 4e bureau du GM 42  qui assura tout cela pour 8 bataillons, un groupe d’artillerie et deux éléments blindés.

Les unités ennemies avaient rejoint la zone et il fallait maintenant se frayer un chemin jusqu’à la plaine de Pleiku. Le Col Sockeel allait pour cela mener un combat d’infanterie par bonds successifs.

Le premier  démarra à l’aube du 27 et aboutit à la conquête du passage de Dak Aynh et à la destruction du bataillon viet qui l’occupait, ; ce fut l’œuvre du I/Corée couvert sur les hauteurs par des bataillons montagnards et bien appuyé par l’artillerie et l’aviation.

Il restait une trentaine de kilomètres de zone dangereuse à parcourir et le GAP les fit de nuit pour installer à son  débouché un pivot pour le bond suivant qui était gros de menaces car c’était pour l’ennemi la dernière chance de détruire la colonne.

Le 28 la progression reprit par bonds successifs toujours couverts sur les hauteurs par des bataillons montagnards particulièrement aptes à cette mission. A midi elle atteignit une clairière assez vaste pour permettre le déploiement de l’artillerie et le regroupement du convoi. Mais le dispositif n’était pas encore totalement en place lorsque l’attaque ennemie se déclencha peu après  midi sur près d’un kilomètre principalement au Nord de la RC 19; bien coordonnée, elle n’était pas improvisée ; la progression assez lente de la colonne avait donné au commandement viet le délai pour l’organiser en un point où il était logique que la colonne s’arrête.

Si cette attaque fut très violente la réaction de nos unités fut à sa mesure, les unités s’accrochant au terrain et l’artillerie débouchant à zéro. Cette réaction fut grandement aidée par un appui aérien aussi massif que précis. Les éléments ennemis qui avaient pénétré le périmètre furent rejetés par une contre-attaque et vers 13h30 les unités viets décrochèrent.

Nos pertes furent sensibles, une vingtaine de tués, non seulement au contact mais parmi les éléments de la colonne qui n’avaient pas encore rejoint le périmètre de sûreté. Celles de l’ennemi étaient considérables ; 250 corps furent dénombrés à proximité de la position et un camion put être chargé d’armes récupérées.

Le 30 juin, après un bivouac en plaine, la colonne rejoignait Pleiku. L’opération Eglantine était terminée. Je n’ajouterai pas un commentaire à la masse de ceux qui ont été faits à son sujet mais je crois être l’interprète de la plupart des survivants en exprimant l’admiration pour le sang-froid et l’habileté manœuvrière du col Sockeel.

Les restes du GM100 participèrent ensuite à la défense de Pleiku qui fut bombardé et harcelé mais pas vraiment attaqué. Le I/Corée, ou plutôt ce qu’il en restait, fut encore engagé fin juillet dans l’opération Myosotis, aux coté du GM 42. Il fut pratiquement anéanti le 17 juillet dans une embuscade au col du Chu Dreh entre Pleiku et Ban Me Thuot; trois jours avant les accords de Genève.

                                 Colonel Philippe POUVESLE.

 

(Le texte ci-dessus m’a été transmis, par le Col P.Pouvesle, fin juin 2009)

                                                                                 Louis-René THEUROT